mardi 6 octobre 2009

Lord Richard Hawley, interview


Le sixième album de Richard Hawley, le superbe Truelove's Gutter, confirme son talent et son élégance. La preuve ci-dessous.

Contrairement à la surenchère d’autres artistes, vous ne proposez que huit chansons dans Truelove’s Gutter.
Quand je fais un disque, j’enregistre environs 40 chansons. Après, il faut bien faire le tri. J’aime pouvoir me dispenser du format habituel de la pop song de 3 minutes, de pouvoir expérimenter des nouvelles choses. Cela a été très difficile de choisir ces 8 chansons, car on a toujours peur de se tromper sur l’ordre, et finalement cela semble bien fonctionner.

Les chansons semblent obéir à une logique toute sentimentale, jouant de leur effet les unes après les autres…
Vu qu’on en avait sélectionné que huit, on pensait que ce serait simple. Mais pas du tout ! « As The Dawn Breaks » a toujours tenu son rôle de première chanson, c’était évident. Pour le reste, ça a été nettement plus ardu ! Si on changeait de place ne fut-ce que deux titres, cela donnait quelque chose de totalement différent. Au final, tous les morceaux s’épousent assez naturellement…

Cet album est assez triste, du moins mélancolique…
À la fin de l’année dernière, quand j’ai fini mon avant-dernier album, j’ai pris une grande décision : me couper de cette bulle de la radio, d’internet… afin que la folie électronique ne prendrait pas une si grande part dans ma vie. J’ai même arrêté d’écouter de la musique, de faire de la musique, de regarder des TV Shows. J’ai eu envie d’être un peu seul. De me relaxer plus, et plus facilement. J’ai réalisé que nous n’avions pas besoin de tant d’informations, et j’ai décidé de me donner plus de temps. Car tout cela m’ennuyait. Je vais me promener dans la nature avec mon chien, je profite de choses vraiment simples. C’est tellement impossible de se couper des médias, ça rend fou ! Évidemment, je consulte mes e-mails et j’ai un téléphone portable, mais que par pure nécessité. Et le fait de me concentrer sur l’essentiel m’a permis de trouver beaucoup d’inspiration pour ce nouveau disque. Le but étant de faire un album plein, cohérent.

C’est votre sixième album, et votre voix semble toujours aussi puissante…
Le ton des chansons est déjà très bas, et le chant peut presque y devenir une conversation. Les morceaux sont lents, je prends mon temps. Nous nous sommes servis d’un très vieux microphone, et le son était si pur qu’il facilitait même ma manière de chanter.

Truelove’s Gitter semble être votre album le plus personnel…
Absolument. Je voulais être vraiment plus calme, plus posé. Je n'ai rien contre les pop songs enjouées, mais je voulais que cet album soit paisible, tout simplement.

De qui vous vous êtes entouré pour l’enregistrement ? Comment avez-vous géré l’orchestration ?
Je voulais que l’album soit symphonique… mais pas cheesy ! Mon grand-père était musicien, il jouait du violon pour nous, comme ma mère le fit également. Je voulais retrouver cet esprit quasi familial. J’ai travaillé avec des brillants musiciens comme David Coulter ou Thomas Bloch. Pour la petite anecdote, nous sommes allés jusqu’à utiliser un glass harmonica inventé par Benjamin Franklin en 1756 ! Au final, ce n’était pas compliqué, il y avait juste la basse, la guitare, le synthé… et les voix. C’est assez minimaliste, finalement.

Vous avez enregistré Truelove’s Gutter à Sheffield. Vous y vivez encore ?
Oui, depuis que je suis né. Sheffield m’apporte de la sérénité. C’est une ville qui bouge beaucoup, sans être la crazy London. La vie est plus simple. À l’orée de la ville, il y a une grande étendue verte, à peine 10 minutes, et on peut y marcher, se ressourcer, respirer le grand air. Manchester ou Birmingham n’ont pas cette chance. Norvégiens, Suédois, Australiens, et même les Chinois s’installent à Sheffield, car cette ville est absolument géniale. Il y a une vraie scène musicale. J’y ai mon propre studio. Tu connais un peu Sheffield?

Je connais assez peu les villes anglaises, à part Londres, Brighton, Torquay ou Cambridge… la ville des Pink Floyd !
Ah, Cambridge ! J’adore cette ville. J’ai bien connu Syd Barrett, je suis allé chez lui, dans sa maison... (soupir)

À propos de musiciens, quels sont ceux qui vous ont le plus inspiré?
Les gens qui m’ont le plus inspiré sont mon père, mon grand-père, ce sont eux qui m’ont appris la musique. J’essaye de ne pas écouter trop de musique, j’ai peur que cela m’influence trop. En revanche, je lis beaucoup. Mais bon, j’aime quand même des choses genre les Beatles, les Byrds… Et Syd Barrett, justement. Tu connais cette chanson, « Golden Hair » ?

Oh, elle est superbe. Et puis c’est un beau poème de James Joyce… J’aime aussi beaucoup « Love Song ».
C’est le deuxième album, c’est ça ?

Oui, Syd Barrett.
Il est super aussi. Mais si je devrais choisir un album, ce serait le premier. D’ailleurs, Gilmour joue pas mal de guitare sur celui-ci.

Il produit les deux albums, d’ailleurs… On pourrait longtemps disserter sur les Pink Floyd, leur innocence perdue à partir d’un certain point. The Wall, tout ça.
Ah oui, The Wall... ça se rapproche du cirque, quelque part.

Vu que vous êtes à Paris, vous avez du voir votre vieil ami de Pulp, Jarvis Cooker ?
Oui, bien sûr ! Nous sommes toujours très proches ! On est quand même amis depuis notre adolescence… On se voit toujours quand je passe à Paris. Hier soir, il est venu au Truskel où je jouais.

Pour revenir sur votre album, pourquoi ce titre, Truelove’s Gutter ?
J’ai mis du temps à trouver ce que je voulais. J’étudie beaucoup l’histoire. J’ai un ami historien qui travaillait sur un très vieux document, du dix-huitième siècle, qui recensait le nom des rues de la ville de l’époque. Parmi ces noms de rues, il y avait Truelove’s et Gutter. Ils furent changés en 1805. Mais les deux mots sonnaient si bien que je n’ai pas pu résister. Ce nom est l’heureux fruit du hasard !

Si vous deviez résumer votre album en quelques mots, que diriez-vous ?
Que j’aimerais, que j’espérerais qu’il soit compassionnel.

Merci beaucoup, Richard.
Avant que tu partes, j’aimerais te jouer une chanson…

Lean out your window, golden hair
I heard you singing in the midnight air
My book is closed, I read no more

Watching the fire dance, on the floor
I’ve left my book, I’ve left my room
For I heard you singing through the gloom
Singing and singing, a merry air
Lean out the window, golden hair...



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